BEAUNE
Musée des Beaux-Arts de Beaune – Série « Trésors cachés » : l’art roman bourguignon à l’honneur avec la Vierge à l’Enfant en majesté
Par Jeannette Monarchi
Publié le 25 Décembre 2024 à 08h17
Dans l’esprit de Noël, le Musée des Beaux-Arts de Beaune dévoile une pièce exceptionnelle de ses collections : la Vierge à l’Enfant en majesté, une sculpture en bois du XIIe siècle, témoin d’un art roman empreint de mystère et de spiritualité.
Cette sculpture en bois datant de la fin de l’époque romane est un témoignage exceptionnel de l’art religieux bourguignon et offre une plongée fascinante dans l’histoire et la foi médiévale. La rencontre avec Delphine Cornuché, responsable des collections du musée, nous aide à décrypter cette œuvre rare, entrée dans les collections en 2012 grâce à un don de M. et Mme Berger, antiquaires à Beaune.
Un témoignage précieux de l’art roman
La sculpture, taillée dans une seule pièce de bois (monoxyle), représente la Vierge assise sur un trône, portant l’Enfant sur ses genoux. Avec ses dimensions imposantes (87 cm de hauteur, 37 cm de largeur, 33 cm de profondeur), cette œuvre se distingue par son style frontal et hiératique, typique des Vierges à l’Enfant en majesté de l’époque romane.
Détails stylistiques :
La Vierge porte une longue tunique ceinturée à la taille, au col serré et aux manches étroites.
L’Enfant, également frontal, est revêtu d’une simple tunique. Il tient un objet — peut-être un oiseau — bien que sa main droite soit mutilée.
Le trône est un siège haut avec quatre montants terminés par des boules aplaties.
Ce qui frappe dans cette représentation est l’absence de lien émotionnel apparent entre la Vierge et l’Enfant, une caractéristique propre à l’art roman où la rigidité et la frontalité dominent pour mieux impressionner le fidèle.
Une histoire mouvementée
Les Vierges en majesté, vénérées au Moyen Âge, furent souvent victimes des tumultes de l’histoire : destructions massives durant la Révolution française, vols ou encore oubli. Cette Vierge du Musée des Beaux-Arts de Beaune a cependant survécu dans un état de conservation remarquable, bien que sensible à l’humidité, aux attaques d’insectes xylophages et au feu.
Une anecdote illustre bien les périls encourus par ces œuvres : en 1976, une Vierge à l’Enfant de l’église Saint-Maurice à Thoisy-le-Désert, près de Pouilly-en-Auxois, fut volée et ne refit surface qu’en 2015 lors d’une vente aux enchères à Londres.
Les Vierges en majesté étaient non seulement des objets de dévotion, mais également des supports de reliques. Cette sculpture présente à l’arrière une cavité qui pourrait avoir servi de compartiment à reliques.

Une œuvre inspirée par une tradition iconographique ancienne
La Vierge Théotokos (« Mère de Dieu ») incarne le pont entre la divinité et l’humanité. Couronnée et assise sur un trône, elle symbolise à la fois la royauté et le mystère de l’Incarnation. Cette iconographie puise ses racines dans l’art paléo-chrétien, byzantin et carolingien.
La représentation de la Vierge en majesté trouve ses origines dans une iconographie ancienne qui s’est développée au fil des siècles avec l’essor du culte marial. Ses racines plongent dans l’art paléo-chrétien, byzantin, ainsi que dans les traditions carolingiennes et ottoniennes.
Ce thème marial se manifeste à travers différentes formes d’expression artistique : sculptures ornementales sur les tympans des églises, retables et chapiteaux.
Le développement de sculptures tridimensionnelles autonomes au cours du XIe siècle marque une renaissance de cet art, amorcée à la fin de la période carolingienne. En Bourgogne, les grands chantiers monastiques, comme l’abbatiale de Cluny, ont joué un rôle moteur dans cette évolution, favorisant la création de statues en trois dimensions.
Une « sœur jumelle » et d'autres représentations mariales
Cette Vierge en majesté possède une « sœur jumelle » conservée dans une collection privée. Bien que légèrement moins haute, cette dernière partage des proportions compactes similaires, mais présente une inclinaison vers l’avant et une tête d’Enfant manquante. Elle proviendrait des environs d’Arnay-le-Duc et aurait été réalisée dans le même atelier.

D’autres Vierges similaires peuvent être admirées localement, notamment à l’Hôtel-Dieu des Hospices Civils de Beaune et à la collégiale Notre-Dame de Beaune.
Un trésor à étudier et à préserver
Bien que la polychromie d’origine soit partiellement usée, les traces de rouge et de vert subsistantes mériteraient une étude stratigraphique pour mieux comprendre les couches successives de peinture et l’évolution esthétique de la sculpture.
La présence de dépôts de poussière sur la cire et quelques fissures mineures justifient une restauration légère pour assurer sa conservation durable.

Pour aller plus loin
Le travail de chercheurs comme Nadia Bertoni-Cren, spécialiste de la sculpture romane en bois, enrichit la compréhension de ces œuvres. Son livre, La sculpture sur bois polychrome des XIe - XIIe siècles en Bourgogne, répertorie et analyse ces pièces uniques, incluant celle du Musée des Beaux-Arts de Beaune.
Une autre Vierge au cœur des collections du musée
Depuis son entrée dans les collections en 2012, cette Vierge en majesté a été présentée dans plusieurs expositions, témoignant de son importance artistique et historique. Elle partage cette reconnaissance avec une autre Vierge à l’Enfant en bois, entrée dans les collections du Musée des Beaux-Arts en 1946 suite à un dépôt de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Beaune (SHAB). Cette sculpture, plus petite (62,5 cm de hauteur, 31 cm de largeur, 24,5 cm de profondeur), proviendrait de Nolay en Côte-d’Or. Bien que massive au niveau du siège, elle a été sciée horizontalement, perdant ainsi entre 20 et 30 cm de sa hauteur initiale.
Celle-ci est dans un état de conservation moins favorable. Cette œuvre présente une grande fente profonde à l’arrière et des modifications ultérieures.

Ses épaules tombantes, ses plis simples et sa ceinture témoignent d’un style hiératique, bien que son menton soit manquant.
Les mains asymétriques et la rigidité de l’ensemble lui confèrent un aspect sanctuarisé. Des rapprochements stylistiques ont également été établis avec une autre Vierge à l’Enfant dite de Lantenay conservée au Musée des Arts Sacrés de Dijon, suggérant une datation similaire à la fin du XIIe siècle.
Présentée lors de l’exposition « Destins croisés » en 2023, cette Vierge a été mise en regard avec le portrait de Charles Aubertin, un des fondateurs de la SHAB, grand érudit beaunois, peint par Henri Perret-Carnot.
Jeannette Monarchi
Rendez-vous en janvier pour la suite de notre série « Trésors cachés », avec un focus sur une autre œuvre exceptionnelle : « La Mansarde » (1865) une huile sur toile signée Hippolyte Michaud, avant qu’elle ne disparaisse temporairement sous la future scénographie de l’exposition permanente dédiée à Paul Day.
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