BEAUNE
Musée des Beaux-Arts de Beaune - Série « Trésors cachés » : l’intimité d’un atelier d’artiste révélée par le beaunois Édouard Darviot
Par Jeannette Monarchi
Publié le 25 Septembre 2025 à 08h01

Après l’Orient flamboyant de Félix-Jules Naigeon présenté en août, le musée nous plonge en septembre dans une atmosphère studieuse : celle de l’atelier d’Hector Hanoteau, saisi par le pinceau d’un jeune peintre beaunois promis à une brillante carrière, Édouard Darviot.
En septembre, Info-Beaune.com poursuit sa série « Trésors cachés » avec le Musée des Beaux-Arts qui sort de ses réserves : « Un coin de l’atelier du peintre Hanoteau », une huile sur toile réalisée en 1883 par Édouard Darviot (1859–1921). Le Musée de Beaune conserve aujourd’hui une dizaine de ses œuvres : huit peintures, un dessin et une aquarelle. Présentée pour la première fois au Salon de Paris en 1888, cette toile fut acquise par la commission du musée en 1893. Elle illustre à merveille l’ambiance studieuse et feutrée de ce mois de rentrée.
La peinture transporte le spectateur dans l’atelier du maître Hector Hanoteau (1823–1890), figure du paysage au XIXe siècle. Édouard Darviot y rend hommage à son professeur à travers une composition foisonnante, où l’homme, assis devant son chevalet, se fond dans un décor d’objets, de tableaux et d’éléments du quotidien.
Jean Luc Édouard Darviot (1859–1921), un artiste beaunois entre tradition et ouverture au monde
Né à Beaune le 19 avril 1859, Jean Luc Édouard Darviot se passionne pour l’art dès sa jeunesse. Il grandit dans un environnement bourgeois éloigné des préoccupations artistiques. Son père, géomètre-expert et négociant en vin, envisage pour lui une carrière plus pragmatique. À 17 ans, le jeune Édouard est envoyé en Allemagne pour parfaire sa connaissance de la langue et s’initier aux marchés viticoles. Mais au lieu de se consacrer uniquement au commerce, il passe une partie de son temps dans les musées de Munich et s’inscrit à l’école des Beaux-Arts locale.
À son retour en France, après une année de service militaire (1879) qui lui inspire un intérêt durable pour l’armée, Édouard Darviot décide de suivre sa véritable vocation. En 1882, il est admis à l’École des Beaux-Arts de Paris, où il se forme auprès de maîtres renommés tels que Tony Robert-Fleury, Adolphe William Bouguereau et surtout Hector Hanoteau, dont il sera l’élève attentif.
Premiers succès et voyages initiatiques
Dès 1882, Édouard Darviot expose au Salon de Paris une nature morte (Les Comptes), qui lui vaut une médaille d’argent. Très vite, il entreprend de nombreux voyages d’étude en Europe : Espagne, Angleterre, Belgique, Pays-Bas. À Madrid, il s’immerge dans l’univers de Velázquez ; ailleurs, il observe et copie les grands maîtres pour enrichir sa palette et sa technique.
En 1883, il part au Maghreb avec son ami Félix-Jules Naigeon, découvrant les couleurs éclatantes et les lumières de l’Orient, qui inspireront certaines de ses toiles orientalistes, comme Intérieur arabe (Biskra, 1884).
Tout au long de sa carrière, il s’impose comme portraitiste et peintre de genre, réalisant notamment le portrait du pape Pie X acquis par le Vatican, ou encore celui de Félix Ziem, considéré comme son chef-d’œuvre. Ses œuvres sont régulièrement exposées à Paris, Dijon et Beaune, où il reçoit de nombreuses distinctions.
En 1914, à 55 ans, il reprend l’uniforme pour la Grande Guerre et s’illustre à la bataille du Bois-Brûlé, recevant la Croix de Guerre. Affecté ensuite comme dessinateur auprès du général Marchand, il réalise une série de dessins documentant le champ de bataille, aujourd’hui conservés au Musée de l’Armée à Paris.
Après-guerre, il partage sa vie entre Dijon et son atelier de Bussy-le-Grand, s’implique dans l’Académie des Arts et Belles-Lettres de Dijon, et défend une vision décentralisée de l’art. Il meurt le 21 août 1921, frappé d’une congestion.
Hector Hanoteau, un maître célébré
Originaire de Decize (Nièvre), Hector Hanoteau (1823–1890) est un peintre de paysages réputé, proche de Courbet, qui partage sa vie entre Paris et sa maison de campagne de Bréit-Petit, près de Cercy-la-Tour. Figure influente, il dirige pendant dix ans une école de paysagisme connue sous le nom d’« école des Roses ». Partisan de la peinture « sur le motif », il initie Darviot et ses autres élèves à une pratique exigeante et intime du paysage.
C’est à ce maître que Darviot rend hommage dans l’œuvre mise en avant aujourd’hui.
Une plongée dans l’atelier d’artiste
Dans « Un coin de l’atelier du peintre Hanoteau », Edouard Darviot invite le spectateur à pénétrer dans un sanctuaire de création. Le maître, assis sur un banc, pinceau à la main, se concentre sur une toile posée sur son chevalet. La lumière douce venue d’une fenêtre éclaire la pièce, révélant une accumulation d’objets : livres, bouteilles, horloge, tubes de peinture, étoffes, fleurs et fruits disposés comme pour une nature morte, outils agricoles et sculptures religieuses.
Les murs sont tapissés des œuvres d’Hanoteau, témoignant de sa production et de son univers esthétique. Au premier plan, un chien assoupi renforce l’impression d’intimité paisible.
Edouard Darviot ne cherche pas à idéaliser son maître. Il le montre tel qu’il est, dans son environnement quotidien. Ce tableau dépasse le simple portrait : il devient une vaste nature morte animée, où l’atelier n’est pas décor mais prolongement de la personnalité du maître. Il s’inscrit dans une mode du XIXe siècle : la représentation de l’atelier d’artiste.
L’atelier d’artiste, un genre en vogue au XIXe siècle
Au XIXe siècle, l’atelier fascine. Les artistes acquièrent une nouvelle place dans la société, et leur vie personnelle intrigue et fascine autant que leurs toiles. Les représentations d’ateliers – en peinture, en gravure, en photographie – se multiplient. Elles documentent à la fois le lieu de travail, de sociabilité et devient une vitrine publicitaire de l’artiste.
De Courbet à Delacroix, en passant par Fantin-Latour, beaucoup se mettent en scène dans leur propre atelier, revendiquant une posture : bohème, méditative, studieuse, ou au contraire mondaine et ouverte.
Parcours et restauration de l’œuvre
Acquise en 1893 par le Musée de Beaune, la toile n’a jamais été présentée dans les salles permanentes. Elle fut toutefois prêtée au Musée Courbet d’Ornans en 2021–2022 pour l’exposition « Un atelier à soi ». À cette occasion, elle a bénéficié d’une restauration complète, après un état de conservation délicat (vernis oxydé, craquelures, perforations).
Aujourd’hui grâce à cette série, le public peut découvrir cette œuvre, qui témoigne à la fois d’une amitié entre maître et élève, d’une mode artistique du XIXe siècle et du talent singulier d’un peintre beaunois encore trop méconnu.
Ce tableau est une fenêtre sur la création, un hommage sincère à un maître influent et un précieux témoin d’une époque où la peinture se nourrissait autant des voyages que des liens humains.
Jeannette Monarchi
A suivre en octobre : un saladier en faïence d’Aprey peinte par Gervais-Protais Pidoux (1725-1790), célèbre peintre-céramiste du 18e siècle.


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