CÔTE D'OR

Conseil départemental - François Sauvadet alerte sur la “situation inédite” du pays et appelle à la responsabilité collective

Conseil départemental - François Sauvadet alerte sur la “situation inédite” du pays et appelle à la responsabilité collective

Gravité, lucidité et engagement : tels sont les mots qui ont marqué l’ouverture de la session d’automne du Conseil départemental. François Sauvadet a appelé à la responsabilité collective face aux défis économiques et sociaux qui se multiplient, tout en réaffirmant la solidité et la capacité d’innovation du Département de la Côte-d’Or.

Ce lundi 13 octobre, le Conseil départemental de la Côte-d’Or s’est réuni pour sa session d’automne dans un climat mêlant émotion et inquiétude politique. Le président François Sauvadet a ouvert les travaux en rendant hommage à Henri Julien, figure politique du Châtillonnais et ancien conseiller départementa, décédé début septembre. Une minute de silence a été observée en mémoire de cet « homme de conviction, profondément gaulliste et fidèle en amitié ». « La Côte-d’Or lui rend hommage. Henri Julien a incarné l’attachement au territoire et le sens du service public », a déclaré François Sauvadet.
 
Un propos liminaire offensif face à la “consternation politique” nationale
Le ton s’est vite durci lorsque le président du Département a évoqué la crise politique nationale et la situation économique tendue. « Je ne vous cache pas ma consternation face à une scène politique qui nous laisse pantois : un gouvernement qui tient quatorze heures, un Premier ministre qui revient et une équipe nommée nuitamment... », a-t-il lancé, visant directement la valse des ministres.
François Sauvadet a fustigé une « situation inédite sous la Ve République », marquée selon lui par « une majorité introuvable » à quelques mois des municipales. Il a insisté sur la nécessité pour l’État et les collectivités de préserver la continuité de l’action publique : « On peut ne pas être d’accord avec le gouvernement, c’est la démocratie. Mais il faut des interlocuteurs ! Paris n’est pas une bulle. Ce qui se trame dans les antichambres de la capitale se répercute directement dans nos territoires, et ce sont nos concitoyens qui en pâtissent ».
 
Alerte sur la fragilité économique et l’explosion des dépenses sociales
Abordant ensuite la situation locale, le président du Département a livré un diagnostic chiffré et alarmant : « La fragilité économique est palpable. Les entreprises hésitent à investir et nous assistons à une dégradation de l’emploi. Nous comptons mille bénéficiaires de plus du RSA par rapport à 2024, soit 6,5 millions d’euros d’impact supplémentaire sur nos finances ».
Une tendance nationale, précise-t-il, qui accentue la pression sur les budgets sociaux : « En 2023, 11 départements étaient à bout de souffle. Ils seront 41 en 2024 et 60 d’ici la fin de 2025. Les dépenses sociales explosent, sans compensation suffisante de l’État ». Et de marteler : « Le système est à bout de souffle. Mais ici, en Côte-d’Or, nous tenons bon, parce que nous avons fait des choix courageux, en modernisant nos services et nos outils ».
 
“Pas de coupes sombres” mais une gestion resserrée
François Sauvadet a voulu rassurer sur la politique interne : « Nous ne serons pas le département des coupes sombres. Nous allons redéfinir chaque poste sur la base des compétences ». Il a mis en avant la réorganisation fonctionnelle et la montée en puissance de l’intelligence artificielle interne : « Nous développons nos outils numériques pour soulager les agents des tâches répétitives. L’objectif est clair : recentrer les équipes sur les missions essentielles auprès de la population ». Le président a confirmé le calendrier budgétaire : « Le budget sera voté les 15 et 16 décembre, comme prévu. Malgré le contexte flou, la Côte-d’Or aura bien un budget pour 2026 ».
 
Innovation et souveraineté numérique : un modèle départemental
Autre point fort de son intervention : la modernisation numérique du territoire. François Sauvadet s’est félicité du succès du cloud souverain départemental : « Nous sommes le premier département à disposer d’un data center proposant des services sécurisés aux communes. Plus d’une centaine d’entre elles y ont déjà adhéré en deux mois ».
Il a également annoncé la création d’un “jumeau numérique Côte-d’Or” : « Cet outil d’intelligence artificielle permettra de simuler des décisions complexes, d’évaluer leurs impacts sur le terrain, et d’améliorer nos politiques publiques ». Une démarche qui s’inscrit, selon lui, dans la stratégie d’attractivité globale : « nous allons rester sur nos objectifs de 100 millions d’investissement. Investir, c’est préparer l’avenir. Un euro investi génère quatre à cinq euros d’impact économique local ».
 
Un appel à l’unité et à la responsabilité
Avant de passer la parole aux groupes politiques, François Sauvadet a appelé à la cohésion départementale : « Le Département est un repère, un pôle de stabilité dans la tourmente nationale. Nous devons continuer à nous retrouver sur l’essentiel. 80 % de nos délibérations sont votées à l’unanimité : c’est notre force ».
 
L’opposition réplique : “Une politique sociale à réinventer”
Dans la foulée, lles conseillers d'opposition ont pris la parole, partageant pour la plupart le diagnostic d’instabilité, mais critiquant les priorités de la majorité.
Christophe Avena président du groupe "Côte-d’Or Terre d’avenir" (Dijon 5) a salué le ton républicain du débat, tout en dénonçant une « impasse politique » nationale et une fragilité sociale grandissante : « La France mérite mieux qu’un climat d’instabilité. La Côte-d’Or connaît la deuxième plus forte hausse de bénéficiaires du RSA : 8 000 foyers ont basculé dans la précarité en deux ans ».
Il a interpellé la majorité sur ses arbitrages : « Est-ce ainsi qu’on lutte contre la précarité quand on augmente le prix des cantines ou qu’on réduit les crédits aux associations d’aide alimentaire ? La solidarité n’est pas une option, c’est l’âme du service public. »
Le président a répliqué fermement : « Il ne s’agit pas de faire moins, mais mieux. Les dépenses sociales sont passées de 280 millions en 2019 à 373 millions en 2025. Nous n’avons jamais autant investi dans l’humain ». Il a contesté les chiffres avancés sur la culture : « 3,68 millions d’euros en 2021, 3,9 millions prévus en 2025 : on ne fait pas moins. Mais nous devons revoir nos process, individualiser les réponses, et contrôler que l’argent public aille bien à ceux qui en ont besoin ».
Marie-Claire Bonnet-Vallet, vice-présidente en charge du tourisme, a tenu à relier solidarité sociale et développement territorial : « La pauvreté existe aussi en milieu rural. La marque 100 % Côte-d’Or n’est pas un gadget, elle fait travailler les artisans, structure les filières et rééquilibre les territoires ».
Une réponse directe aux critiques sur les investissements économiques du Département :
« La solidarité passe aussi par la vitalité de nos villages ».


Massar N’Diaye : “L’action sociale, ce sont des vies, pas des chiffres”
Massar N’Diaye, a livré une intervention poignante : « Avant de parler chiffres, parlons de vies. Les 10 920 bénéficiaires du RSA, les 47 000 inscrits à France Travail, ce ne sont pas des statistiques, ce sont des trajectoires humaines ».
Il reproche à la majorité de réduire les moyens d’insertion : « Vous faites 400 000 euros d’économies sur le retour à l’emploi. Ce n’est pas une politique d’insertion, c’est un désengagement. À force de parler d’assistanat, on creuse les fractures et on nourrit la défiance et on favorise l’extrême droite »
Et de conclure : « Il faut une politique sociale équitable, ambitieuse, qui rassemble au lieu d’opposer »


Céline Maglica, conseillère départementale, a elle aussi mis en garde contre l’épuisement des travailleurs sociaux : « L’individualisation des réponses, c’est beau sur le papier. Mais comment faire, quand les effectifs sont déjà au minimum ? Quand on travaille avec l’humain, on ne peut pas faire mieux avec moins ».
Elle a également rappelé la nécessité de repenser la répartition des richesses : « Le pays n’a jamais été aussi riche, et pourtant la précarité augmente. Le problème, ce n’est pas le manque d’argent, c’est sa répartition ».


François Sauvadet a tenu à clarifier sa vision en insistant sur la logique de prévention : « L’action sociale ne doit pas être uniquement réparatrice. Plus tôt nous identifions les risques, plus tôt nous pouvons intervenir. L’individualisation, ce n’est pas une réduction des moyens, c’est une meilleure efficacité ». Et de conclure, sur un ton à la fois grave et fédérateur : « Je ne fermerai pas de site. Je ne veux pas d’oubliés de la République, ni dans nos villes, ni dans nos villages. La Côte-d’Or restera un département solide, ancré dans le réel, qui protège et qui agit ».


Carine Hervieux, enfin, a élargi le débat à la santé environnementale : « En ce mois d’Octobre rose, pensons aussi à la prévention environnementale. Notre cadre de vie influe sur notre santé et sur les dépenses publiques ».

Jeannette Monarchi