BOURGOGNE

La Région agit en urgence pour sauver ses petites lignes. Jérôme Durain : « Nous pallions l’absence de l’État »

La Région agit en urgence pour sauver ses petites lignes. Jérôme Durain : « Nous pallions l’absence de l’État »

À la veille de l’assemblée plénière des 16 et 17 octobre, le président de la Région Bourgogne–Franche-Comté, Jérôme Durain, a présenté les principaux dossiers régionaux. La Région investit en urgence plus de 15 millions d’euros pour maintenir deux lignes ferroviaires menacées de fermeture, tout en réaffirmant ses ambitions économiques, éducatives et environnementales.

La conférence de presse de Jérôme Durain, ce mercredi matin, s’est ouverte sur un constat d’inquiétude : « Une assemblée qui intervient dans un contexte politique national instable et non rassurant pour la collectivité régionale, puisqu’il impactera le travail budgétaire et les orientations », a-t-il rappelé.
La mobilité est au cœur de cette session. Le président socialiste a annoncé une intervention d’urgence pour sauver deux lignes de desserte fine du territoire, menacées d’arrêt faute d’engagement financier de l’État. « La mobilité, c’est à la fois un service public et un outil d’aménagement du territoire. Elle conditionne la vie quotidienne des habitants, leur capacité à se déplacer, à travailler, à accéder aux services essentiels. C’est aussi ce qui met du lien entre les territoires. »
 
Ligne des Hirondelles : 12,2 M€ pour éviter la fermeture
Menacée d’interruption dès le 14 décembre par SNCF Réseau, faute de travaux, la ligne des Hirondelles (qui relie Dole à Saint-Claude, dans le Jura) figure parmi les plus fragiles de la région. Elle transporte 8 trains par jour, parmi les 600 circulant quotidiennement en Bourgogne–Franche-Comté. Mais ses 30 tunnels, viaducs et ponts sont aujourd’hui dans un état de dégradation critique. Face à l’urgence, la Région débloque 12,2 millions d’euros pour permettre la poursuite du trafic et réaliser les travaux les plus indispensables à court terme. « Une question s’est posée : est-ce qu’on laisse fermer ou est-ce qu’on agit ? J’ai fait le choix de la responsabilité et de proposer un investissement lourd de 12 millions d’euros, a déclaré Jérôme Durain. Ce n’est pas un sauvetage définitif, c’est un investissement conservatoire. On maintient la circulation, mais le patrimoine reste dans un état très préoccupant. »
Le président n’a pas caché son exaspération face à la position de l’État, propriétaire de l’infrastructure mais absent du financement. « Ce patrimoine appartient à l’État, et même si nous n'en avons pas la compétence, c’est à nous d’assumer le sous-investissement accumulé depuis des décennies. Ce n’est pas tenable. Nous faisons ici acte de responsabilité, mais nous ne pourrons pas le réitérer. »
La Région espère provoquer un électrochoc et pousser le gouvernement à préciser sa stratégie nationale sur les petites lignes, toujours en attente d’un rapport commandé par le ministère des Transports. « C’est une dernière chance pour l’État de reconsidérer sa place dans le financement des infrastructures ferroviaires. Nous faisons notre part, mais nous ne pourrons pas continuer seuls. »
 
Clamecy–Corbigny : 3,6 M€ pour relancer les circulations voyageurs
La seconde ligne concernée est celle de Clamecy–Corbigny (Nièvre), où les circulations sont interrompues depuis l’été. Alors que l’État n’a prévu que 300 000 € pour le fret, la Région engage 3,6 M€ pour relancer les liaisons voyageurs.
Des navettes Mobigo à 2 € assurent actuellement la liaison entre Corbigny et Auxerre.
« Ce sont des choix lourds financièrement, mais nécessaires. Ces délibérations marquent la fin d’une période et l’ouverture d’une autre : celle de l’interpellation de l’État », a martelé Jérôme Durain.
Sur dix ans, la Région devrait investir près de 500 millions d’euros dans les petites lignes ferroviaires, « un effort colossal que nous ne pourrons pas assumer seuls », a prévenu le président.
 
98 M€ pour prolonger la vie des trains régionaux
La Région investit également 98 millions d’euros dans la rénovation de 23 Autorails Grande Capacité (AGC), construits par Bombardier au début des années 2000. Cette “opération mi-vie” doit prolonger leur durée d’exploitation de vingt ans.
Les travaux, menés à Nevers et Tergnier, débuteront en 2027 pour s’achever en 2030.
 
Économie : un bilan positif du SRDEII 2022–2028
Le président a aussi détaillé le bilan 2024 du Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII). Avec 45 M€ de crédits régionaux et 219 M€ de fonds mutualisés, la Région a soutenu plus de 160 PME et 81 entreprises innovantes. « Ce bilan montre que la Région est dynamique, qu’elle prend sa part pour soutenir les entreprises dans une période difficile », a souligné Jérôme Durain.
Parmi les réussites : la création du fonds OSER BFC, le lancement du pôle Infr@2050 dédié à la décarbonation des travaux publics et la labellisation “Capitale French Tech de l’année”.
 
Lycées et précarité étudiante : 50 M€ pour 2026
La Région consacre 50 millions d’euros à la dotation des 128 lycées publics pour 2026. Si le montant baisse légèrement par rapport à 2025 (58 M€), en raison de la stabilisation des coûts énergétiques, il reste en hausse de 20 % depuis 2022.
Par ailleurs, un nouveau programme “Égalité des chances et lutte contre la précarité étudiante”, doté de 600 000 €, sera lancé en 2026 pour soutenir des projets dans les campus de Bourgogne–Franche-Comté. « L’objectif est de renforcer toutes les actions contre la précarité et les discriminations étudiantes. Les lycées et les étudiants restent au cœur de nos priorités. »
 
Santé animale : vigilance sur la dermatose nodulaire contagieuse
Face à un premier cas détecté dans le Jura, la Région prévoit 300 000 € pour anticiper une éventuelle propagation de la dermatose nodulaire contagieuse dans les élevages bovins. « Une précaution prudente, car c’est une crainte majeure pour notre cheptel », a justifié le président.
 
Budget 2025 : ajustements maîtrisés
La décision modificative n°2 du budget régional 2025 traduit des ajustements techniques : +24,8 M€ de recettes et -36,8 M€ de dépenses, sans remise en cause des politiques prioritaires. Les hausses concernent notamment la formation professionnelle (+6,4 M€) et la transition énergétique (+3,46 M€).
 
Contexte national : “Le temps est à la responsabilité”
Enfin, Jérôme Durain est revenu sur le contexte national et a réaffirmé son soutien à la position du PS de ne pas censurer le nouveau gouvernement Lecornu. « C’est une période où nous devons prendre nos responsabilités. Le Parti socialiste joue le jeu du travail parlementaire plutôt que de précipiter le pays dans le chaos » a-t-il déclaré, faisant référence à La France insoumise et au Rassemblement national.
Selon lui, le PS mise sur un véritable débat parlementaire, susceptible de permettre des avancées concrètes pour les Français : davantage de justice sociale, avec la suspension de la réforme des retraites, et une plus grande équité fiscale, notamment à travers la proposition Zucman. « Le monde entier nous observe. Il est temps d’apporter de la stabilité. Ne pas censurer ne signifie pas pour autant donner un blanc-seing sur les actions futures. Nous savons que la bataille budgétaire sera extrêmement difficile, et je me prépare à une véritable fronde » a-t-il ajouté.

Jeannette Monarchi

L'assemblée plénière se tient ces jeudi 16 et vendredi 17 octobre. Ouverture de séance le jeudi 16 octobre à 14 h et le vendredi 17 octobre séance de 9 h à 12 h. Retransmission à suivre en direct sur la chaîne YouTube