Beaune – Alexandre Landre, Commissaire-priseur : la passion sous le marteau

Le métier de commissaire-priseur reste entouré de mystère. Alexandre Landre, lui, a choisi d’en révéler toutes les facettes : le goût du beau, la rigueur du droit, l’instinct du commerce et l’émotion des rencontres. À 35 ans il préside son groupe de six maisons de ventes et s’impose comme une figure montante du marché de l’art.

Dans le vaste entrepôt de la rue de Chevignerot à Beaune, les objets s’alignent, chargés d’histoire et de promesses. Une pendule, un tableau, un buffet, du mobilier en pagaille, des caisses de vin et même une voiture du début des années cinquante : autant de fragments de vies prêts à changer de mains. Au centre, Alexandre Landre orchestre ce ballet silencieux. D’un œil, il évalue, de l’autre, il imagine le futur acquéreur. Entre ses mains, les objets ne sont jamais de simples biens matériels, mais des témoins d’émotions et de transmission. « Ce que j’aime, c’est la vie des objets. Leurs cicatrices racontent des histoires. Quand je fais tomber le marteau, je ne vends pas seulement un bien, je transmets une mémoire. »
 
Un métier de passion encore méconnu
Le métier de commissaire-priseur reste entouré de mystère. Trop souvent perçu comme un univers réservé à une élite, il demeure pourtant au cœur de la vie artistique et économique française. « C’est un métier encore méconnu du grand public. Beaucoup n’osent pas franchir la porte d’une salle des ventes, craignant que ce soit réservé à quelques initiés, alors qu’il y a des objets pour tous les budgets, pour tous les goûts. »
Dans sa voix, une conviction : le beau n’est pas forcément cher. « Il faut simplement oser pousser la porte, regarder, s’émerveiller. Les objets ont une âme, une histoire — et c’est cela que je veux partager. »
 
Des racines bourguignonnes et un parcours éclectique
Né en Bourgogne, Alexandre Landre a grandi entre Paris, Athènes et Nancy. Une enfance ouverte sur la culture et le voyage qui l’a marqué durablement. « J’ai toujours baigné dans le milieu artistique. Mes parents m’ont transmis ce goût de la curiosité et du beau. »
Dès son premier stage au collège il choisit une maison de ventes et sait que son destin est tracé il sera commissaire-priseur. « J’ai été attiré par la tension de la vente, le moment où tout peut basculer. C’est un métier d’adrénaline et de réseau, de relations humaines. Il faut aimer les gens, les histoires, les objets. »
Etudes de droit, d’histoire de l’art, réussite à l’examen très sélectif, c’est à l’issue de ce parcours académique de huit années qu’il sera officiellement diplômé par la ministre de la justice Nicole Belloubet, lors d’une cérémonie place Vendôme en octobre 2019. « Je n’avais pas de famille dans le métier, mais j’ai eu la chance d’avoir un soutien moral et familial immense. »
 
L’entrepreneur de l’art
Prenant la succession de maître Colliette à Semur en-Auxois, il réactive la maison de ventes endormie et dans le même temps crée sa première nouvelle maison à Beaune un ancrage naturel en Bourgogne. « Beaune, c’est le joyau de la Bourgogne qui brille le plus. C’était évident pour moi de m’y installer. »
En six ans, Alexandre Landre a construit son réseau avec méthode et passion. Cinq hôtels des ventes sous sa bannière – Beaune, Semur-en-Auxois, Nancy, Strasbourg Paris – et un sixième, la maison Pierre Bergé & associés, avenue Kleber à Paris XVI qu’il a rachetée en 2023. Plus d’une centaine de ventes par an, plus de 75 000 objets dispersés pour 25 millions d’euros adjugés. « C’est un métier de logistique et d’organisation. Nous faisons le pari de multiplier les ventes, d’aller vite, sans jamais sacrifier la qualité. » Son credo : ancrer chaque maison dans une spécialité en lien avec son ADN régional. Beaune, c’est le vin ; Nancy, l’Art nouveau ; Paris le luxe ; Semur le goût classique, Strasbourg les bijoux.
 
Un style à la française
Dans son bureau Alexandre Landre revendique une esthétique classique et souriante. « Pour être aimé, il faut être aimable », sourit-il. Une devise simple, mais qui résume bien son approche. « Mon style, c’est un classicisme à la française. Je crois à la rigueur avec une touche d’élégance, mais aussi à la chaleur du contact humain. »
Il se décrit comme un passeur d’émotion, pas un simple commerçant. Il refuse les compromis : « Je ne fais pas toutes les ventes. On est bon que dans ce qu’on aime. L’émotion doit être au centre de notre métier. L’art, c’est une affaire de cœur. Si la flamme n’est pas là, rien ne fonctionne ».
 
Une maison en mouvement
Avec 50 collaborateurs, dont cinq commissaires-priseurs associés, son frère et sa mère à la direction, Landre & Associés est une entreprise à taille humaine dotée d’une énergie communicative. Installé depuis peu dans un entrepôt de 5 000 m² à Beaune, pour accompagner l’essor des ventes en ligne et des services logistiques communs, il modernise l’organisation : service complet de transport, d’enlèvement, de livraison, de stockage… chaque étape est pensée pour simplifier la vie des vendeurs et des acheteurs. « C’est un métier de services avant tout. Nous sommes là pour aider les gens à trouver des solutions. »
Partagé entre Paris la semaine et Beaune le week-end, Alexandre Landre sillonne la France – et parfois le monde – à la recherche d’objets d’exception. « Je peux être un jour à Strasbourg, le lendemain à Nancy, et faire un saut à Singapour. C’est un métier de mouvement permanent. »
Son meilleur souvenir ? Il rit : « Une statue chinoise estimée à 200 euros… qui s’est envolée à 300 000 ! Cela arrive parfois, et c’est ce qui rend ce métier magique. Même quand le commissaire-priseur se trompe, l’acheteur corrige ! ». Derrière l’humour, une vraie philosophie : la vente est un théâtre d’émotions, où l’instinct, la passion et la justesse s’entremêlent. « Notre rôle, c’est de révéler la valeur des choses et des gens. Ce métier est une école de l’humilité et de la curiosité. »
 
L’émotion du marteau
Ce qu’il cherche à chaque vente ? L’émotion, encore et toujours. « Notre métier est d’accompagner les gens dans des moments de vie forts :  successions, déménagements, transmissions. Nous donnons une seconde vie aux objets, tout en révélant leur valeur. » Et de conclure, avec la sincérité d’un homme qui vit son métier pleinement : « Je me bats pour que les salles des ventes restent des lieux vivants, ouverts, culturels. Les objets racontent des histoires. À nous de les faire vibrer ».

Jeannette Monarchi

ALEXANDRE LANDRE ~ BEAUNE - Maison de ventes aux enchères
26, place Monge à Beaune pour les ventes de vins et 17 rue de Chevignerot pour les estimations. Tél. 03 80 24 09 66.
Pour retrouver les ventes à venir www.alexandrelandre.com et pour une expertise gratuite et confidentielle de tous vos objets et vins : [email protected]