BOURGOGNE

Beaune - Le BIVB devient le Comité Bourgogne : une interprofession en mutation

Beaune - Le BIVB devient le Comité Bourgogne : une interprofession en mutation

Nom, cap, méthode : les Vins de Bourgogne redéfinissent leur avenir. Face à un marché sous pression et à des moyens en baisse, l’interprofession choisit la transition, la rigueur… et la refondation. Budget ciblé, communication recentrée, gouvernance modernisée : le futur Comité Bourgogne veut conjuguer sobriété et ambition.

« Le maître-mot de cet exercice, c’est la transition » annonce Laurent Delaunay, président du BIVB (négoce). Réunis ce mercredi au Palais des Congrès de Beaune en assemblée générale estivale, les membres du Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB) ont entériné un budget 2026 contraint, annoncé un changement de nom – « Comité Bourgogne » – et engagé une réforme de gouvernance en profondeur. Objectif : adapter l’interprofession à une époque d’incertitudes multiples, sans renoncer à ses ambitions de rayonnement. Conséquence : un recentrage stratégique, avec une revue des priorités autour des fondamentaux – soutien aux appellations, innovation technique, intelligence économique. « Il ne s’agit pas de reculer, mais de mieux cibler, a expliqué le président négoce Laurent Delaunay. Le contexte nous impose de faire des choix responsables. »
 
Une interprofession à l’équilibre fragile
Malgré des résultats commerciaux positifs au 1er semestre 2025 — +1,4 % en volume dans la grande distribution et +7,1 % à l’export — le BIVB refuse de céder à l’euphorie. « Dans un monde viticole chahuté, la Bourgogne est un îlot de réussite économique, mais ces dynamiques sont fragiles. On est en permanence sur une ligne de crête, a insisté Laurent Delaunay. Rien n’est jamais acquis dans le monde du vin. Il faut faire preuve de prudence et d’humilité. »
Le contexte mondial pèse : déconsommation, incertitude géopolitique, baisse tendancielle de la production mondiale, droits de douane américains menaçants, mutation des attentes des consommateurs. Autant de signaux faibles que la Bourgogne ne peut ignorer.
 
Un budget de transition, sous contrainte
Avec une récolte 2024 en retrait en raison des aléas climatiques, les ressources issues des cotisations seront à la baisse en 2026. Le BIVB a donc choisi une ligne claire : prioriser, rééquilibrer, anticiper. « Nous devons être rigoureux dans nos dépenses. Revoir nos priorités. Quelle part donner à nos différentes missions avec un budget plus contraint ? », a questionné Laurent Delaunay.
En clair, moins de marges pour l’expérimentation, plus de ciblage. Le budget 2026 recentre les efforts sur la préservation des terroirs, la communication raisonnée et une réflexion de fond sur les missions statutaires de l’interprofession.
 
Nouveau nom, nouvelle gouvernance : cap sur le « Comité Bourgogne »
Un changement d’identité majeur a été annoncé par François Labet, président délégué (viticulture) : le BIVB prendra dès 2026 le nom de Comité Bourgogne. Ce choix, clairement inspiré du Comité Champagne, vise une « meilleure lisibilité à l’échelle nationale et internationale ».
Ce changement de nom s’accompagnera d’une transformation de la gouvernance. Le système actuel, basé sur une présidence alternée tous les deux ans entre négoce et viticulture, sera remplacé par un binôme de co-présidents, élus pour un mandat commun de quatre ans. « C’est une interprofession modernisée, plus simple, plus lisible, plus intégrée entre négoce et viticulture que nous voulons bâtir, a expliqué François Labet, actuel président délégué. Ce sera à une nouvelle équipe d’incarner ce cap, après les élections de janvier prochain. »
 
La Cité des Climats en redémarrage stratégique
Autre chantier sensible : la Cité des Climats et des Vins de Bourgogne, qui connaît une phase de repositionnement après des débuts jugés trop ambitieux. Le BIVB a repris la main en direct avec pour mission de mieux l’intégrer dans la stratégie globale du BIVB, notamment via les offres de l’École des vins. La Cité est en recherche d’un nouveau directeur commercial. « Nous avons fait une erreur stratégique : penser que la Cité pouvait porter seule la notoriété de la Bourgogne. C’était une erreur. Nous aurions dû commencer plus modestement. Elle doit être un levier parmi d’autres, a reconnu Laurent Delaunay. Nous croyons en la réussite de cet outil dans lequel nous avons déjà investi 3 millions d’euros. »
Le BIVB entend désormais en faire un levier de communication fort de la filière auprès du grand public, articulé avec les autres dispositifs de la filière et appuyé sur l’École des vins de Bourgogne. Une synergie renforcée est attendue avec l’installation, d’ici début 2026, de l’Association des Climats du vignoble de Bourgogne dans les murs de la Cité.
 
Recherche, innovation, adaptation
Le pôle « technique et innovation » a présenté les projets de fond en cours : amélioration du matériel végétal avec des greffes plus résistantes à la flavescence dorée et au mildiou, la création prochaine d’un groupe de réflexion sur l’innovation génétique (une première en France dans le vin) et des travaux sur la biodiversité et les sols.
Le volet économique et stratégique, de son côté, a rappelé l’importance de maintenir l’équilibre entre les appellations « accessibles » et les grands crus très haut de gamme, dans un marché où la question des prix devient un bruit de fond.
 
Communication et rayonnement : la marque Bourgogne primée
La campagne « Tellement Bourgogne », déployée nationalement, poursuit son chemin. Deux récompenses nationales viennent saluer la stratégie de communication déployée en 2025 pour son impact visuel et son efficacité : Médaille d’or pour la campagne presse écrite et une Médaille de bronze à venir en septembre pour la stratégie commerciale entreprise.
Le BIVB rappelle qu’il ne relâchera pas ses efforts de communication, malgré les contraintes budgétaires.
 
Un hommage à Nicolas Potel
L’assemblée s’est ouverte sur un moment de recueillement, à la mémoire de Nicolas Potel, vigneron-négociant pionnier du micro-négoce, récemment décédé. « Une personnalité éminente, attachante, au parcours exemplaire. Cet événement dramatique nous a tous bouleversés », a déclaré Laurent Delaunay.
 
Et maintenant ?
Le renouvellement des présidences, prévu en janvier 2026, sera l’occasion de passer le flambeau à une nouvelle équipe avec la mise en place du Comité Bourgogne nouvelle version. Une page se tourne, mais la vision reste claire : faire de la Bourgogne une région viticole agile, durable et cohérente, à l’écoute du monde et fidèle à son identité.

Jeannette Monarchi

Lire par ailleurs : Droits de douane - La filière viticole bourguignonne réunie à Beaune suspendue aux décisions américaines